Les gouvernements, par définition, n’ont pas de conscience. Le monde où je vis me répugne, mais je me sens solidaire des hommes qui souffrent.
Albert Camus
Albert Camus
93 ans. C'est un peu la toute dernière étape. La fin n'est plus bien loin. Quelle chance de pouvoir en profiter pour rappeler ce qui a servi de socle à mon engagement politique: les années de résistance et le programme élaboré il y a soixante-six ans par le Conseil National de la Résistance! C'est à Jean Moulin que nous devons, dans le cadre de ce Conseil, la réunion de toutes les composantes de la France occupée, les mouvements, les partis, les syndicats, pour proclamer leur adhésion à la France combattante et au seul chef qu'elle se reconnaissait: le général de Gaulle. De Londres où j'avais rejoint le général de Gaulle en mars 1941, j'apprenais que ce Conseil avait mis au point un programme, l'avait adopté le 15 mars 1944, proposé pour la France libérée un ensemble de principes et de valeurs sur lesquels reposerait la démocratie moderne de notre pays.
De ces principes et de ces valeurs, nous avons aujourd'hui plus que jamais besoin. Il nous appartient de veiller tous ensemble à ce que notre société reste une société dont nous soyons fiers: pas cette société des sans-papiers, des expulsions, des soupçons à l'égard des immigrés, pas cette société où l'on remet en cause les retraites, les acquis de la Sécurité sociale, pas cette société où les médias sont entre les mains des nantis, toutes choses que nous aurions refusé de cautionner si nous avions été les véritables héritiers du Conseil National de la Résistance.
A partir de 1945, après un drame atroce, c'est une ambitieuse résurrection à laquelle se livrent les forces présentes au sein du Conseil de la Résistance. Rappelons-le, c'est alors qu'est créée la Sécurité sociale comme la Résistance le souhaitait, comme son programme le stipulait: "Un plan complet de Sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d'existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail"; "une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours." Les sources d'énergie, l'électricité et le gaz, les charbonnages, les grandes banques sont nationalisées. C'est ce que ce programme préconisait encore... "le retour à la nation des grands moyens de production monopolisés, fruit du travail commun, des sources d'énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d'assurance et des grandes banques"; "l'instauration d'une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l'éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l'économie".
L'intérêt général doit primer sur l'intérêt particulier, le juste partage des richesses créées par le monde du travail primer sur le pouvoir de l'argent. La Résistance propose "une organisation rationnelle de l'économie assurant la subordination des intérêts particuliers à l'intérêt général et affranchie de la dictature professionnelle instaurée à l'image des États fascistes", et le Gouvernement provisoire de la République s'en fait le relais.
Une véritable démocratie a besoin d'une presse indépendante; la Résistance le sait, l'exige, en défendant "la liberté de la presse, son honneur et son indépendance à l'égard de l'État, des puissances d'argent et des influences étrangères." C'est ce que relaient encore les ordonnances sur la presse, dès 1944. Or, c'est bien ce qui est aujourd'hui en danger.
La Résistance en appelait à "la possibilité effective pour tous les enfants français de bénéficier de l'instruction la plus développée", sans discrimination; or, les réformes proposées en 2008 vont à l'encontre de ce projet. De jeunes enseignants, dont je soutiens l'action, ont été jusqu'à refuser de les appliquer et ils ont vu leurs salaires amputés en guise de punition. Ils se sont indignés, ont "désobéi", ont jugé ces réformes trop éloignées de l'idéal de l'école républicaine, trop au service d'une société de l'argent et ne développant plus assez l'esprit créatif et critique.
C'est tout le socle des conquêtes sociales de la Résistance qui est aujourd'hui remis en cause. Le motif de la résistance, c'est l'indignation. On ose nous dire que l'État ne peut plus assurer les coûts de ces mesures citoyennes. Mais comment peut-il manquer aujourd'hui de l'argent pour maintenir et prolonger ces conquêtes alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la Libération, période où l'Europe était ruinée? Sinon parce que le pouvoir de l'argent, tellement combattu par la Résistance, n'a jamais été aussi grand, insolent, égoïste, avec ses propres serviteurs jusque dans les plus hautes sphères de l'État. Les banques désormais privatisées se montrent d'abord soucieuses de leurs dividendes, et des très haut salaires de leurs dirigeants, pas de l'intérêt général. L'écart entre les plus pauvres et les plus riches n'a jamais été aussi important; et la course à l'argent, la compétition, autant encouragée.
Le motif de base de la Résistance était l'indignation
Nous, vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l'héritage de la Résistance et ses idéaux. Nous leur disons: prenez le relais, indignez-vous! Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie.
Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous, d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux. Quand quelque chose vous indigne comme j'ai été indigné par le nazisme, alors on devient militant, fort et engagé. On rejoint ce courant de l'histoire et le grand courant de l'histoire doit se poursuivre grâce à chacun. Et ce courant va vers plus de justice, plus de liberté mais pas cette liberté incontrôlée du renard dans le poulailler.
Ces droits, dont la Déclaration universelle a rédigé le programme en 1948, sont universels. Si vous rencontrez quelqu'un qui n'en bénéficie pas, plaignez-le, aidez-le à les conquérir.
Deux visions de l'histoire
Quand j'essaie de comprendre ce qui a causé le fascisme, qui a fait que nous ayons été envahis par lui et par Vichy, je me dis que les possédants, avec leur égoïsme, ont eu terriblement peur de la révolution bolchévique. Ils se sont laissés guider par leurs peurs. Mais si, aujourd'hui comme alors, une minorité active se dresse, cela suffira, nous aurons le levain pour que la pâte lève.
Certes, l'expérience d'un très vieux comme moi, né en 1917, se différencie de l'expérience des jeunes d'aujourd'hui. Je demande souvent à des professeurs de collège la possibilité d'intervenir auprès de leurs élèves, et je leur dis: vous n'avez pas les mêmes raisons évidentes de vous engager. Pour nous, résister, c'était ne pas accepter l'occupation allemande, la défaite. C'était relativement simple. Simple comme ce qui a suivi, la décolonisation. Puis la guerre d'Algérie. Il fallait que l'Algérie devienne indépendante, c'était évident. Quant à Staline, nous avons tous applaudi à la victoire de l'Armée rouge contre les nazis, en 1943. Mais déjà lorsque nous avions eu connaissance des grands procès staliniens de 1935, et même s'il fallait garder une oreille ouverte vers le communisme pour contrebalancer le capitalisme américain, la nécessité de s'opposer à cette forme insupportable de totalitarisme s'était imposée comme une évidence.
Ma longue vie m'a donné une succession de raisons de m'indigner. Ces raisons sont nées moins d'une émotion que d'une volonté d'engagement. Le jeune normalien que j'étais a été très marqué par Sartre, un aîné condisciple. La Nausée, Le Mur, pas L 'Être et le néant, ont été très importants dans la formation de ma pensée. Sartre nous a appris à nous dire: "Vous êtes responsables en tant qu'individus." C'était un message libertaire. La responsabilité de l'homme qui ne peut s'en remettre ni à un pouvoir ni à un dieu. Au contraire, il faut s'engager au nom de sa responsabilité de personne humaine.
Quand je suis entré à l'École normale de la rue d'Ulm, à Paris, en 1939, j'y entrais comme fervent disciple du philosophe Hegel, et je suivais le séminaire de Maurice Merleau-Ponty. Son enseignement explorait l'expérience concrète, celle du corps et de ses relations avec le sens, grand singulier face au pluriel des sens. Mais mon optimisme naturel, qui veut que tout ce qui est souhaitable soit possible, me portait plutôt vers Hegel.
L'hégélianisme interprète la longue histoire de l'humanité comme ayant un sens : c'est la liberté de l'homme progressant étape par étape. L'histoire est faite de chocs successifs, c'est la prise en compte de défis. L'histoire des sociétés progresse, et au bout, l'homme ayant atteint sa liberté complète, nous avons l'État démocratique dans sa forme idéale.
Il existe bien sûr une autre conception de l'histoire. Les progrès faits par la liberté, la compétition, la course au "toujours plus", cela peut être vécu comme un ouragan destructeur. C'est ainsi que la représente un ami de mon père, l'homme qui a partagé avec lui la tâche de traduire en allemand À la Recherche du temps perdu de Marcel Proust. C'est le philosophe allemand Walter Benjamin. Il avait tiré un message pessimiste d'un tableau du peintre suisse, Paul Klee, l'Angelus Novus, où la figure de l'ange ouvre les bras comme pour contenir et repousser une tempête qu'il identifie avec le progrès. Pour Benjamin qui se suicidera en septembre 1940 pour fuir le nazisme, le sens de l'histoire, c'est le cheminement irrésistible de catastrophe en catastrophe.
L'indifférence: la pire des attitudes
C'est vrai, les raisons de s'indigner peuvent paraître aujourd'hui moins nettes ou le monde trop complexe. Qui commande, qui décide? Il n'est pas toujours facile de distinguer entre tous les courants qui nous gouvernent. Nous n'avons plus affaire à une petite élite dont nous comprenons clairement les agissements. C'est un vaste monde, dont nous sentons bien qu'il est interdépendant.
Nous vivons dans une inter connectivité comme jamais encore il n'en a existé. Mais dans ce monde, il y a des choses insupportables. Pour le voir, il faut bien regarder, chercher.
Je dis aux jeunes: cherchez un peu, vous allez trouver. La pire des attitudes est l'indifférence, dire "je n'y peux rien, je me débrouille". En vous comportant ainsi, vous perdez l'une des composantes essentielles qui fait l'humain. Une des composantes indispensables: la faculté d'indignation et l'engagement qui en est la conséquence.
On peut déjà identifier deux grands nouveaux défis:
1. L'immense écart qui existe entre les très pauvres et les très riches et qui ne cesse de s'accroître. C'est une innovation des XX` et XXI` siècle. Les très pauvres dans le monde d'aujourd'hui gagnent à peine deux dollars par jour. On ne peut pas laisser cet écart se creuser encore. Ce constat seul doit susciter un engagement.
2. Les droits de l'homme et l'état de la planète. J'ai eu la chance après la Libération d'être associé à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par l'Organisation des Nations unies, le 10 décembre 1948, à Paris, au palais de Chaillot. C'est au titre de chef de cabinet de Henri Laugier, secrétaire général adjoint de l'ONU, et secrétaire de la Commission des Droits de l'homme que j'ai, avec d'autres, été amené à participer à la rédaction de cette déclaration.
Je ne saurais oublier, dans son élaboration, le rôle de René Cassin, commissaire national à la Justice et à l'Éducation du gouvernement de la France libre, à Londres, en 1941, qui fut prix Nobel de la paix en 1968, ni celui de Pierre Mendès France au sein du Conseil économique et social à qui les textes que nous élaborions étaient soumis, avant d'être examinés par la Troisième commission de l'assemblée générale, en charge des questions sociales, humanitaires et culturelles. Elle comptait les cinquantequatre États membres, à l'époque, des Nations unies, et j'en assurais le secrétariat. C'est à René Cassin que nous devons le terme de droits "universels" et non "internationaux" comme le proposaient nos amis anglo-saxons. Car là est bien l'enjeu au sortir de la seconde guerre mondiale: s'émanciper des menaces que le totalitarisme a fait peser sur l'humanité.
Pour s'en émanciper, il faut obtenir que les États membres de l'ONU s'engagent à respecter ces droits universels. C'est une manière de déjouer l'argument de pleine souveraineté qu'un État peut faire valoir alors qu'il se livre à des crimes contre l'humanité sur son sol. Ce fut le cas d'Hitler qui s'estimait maître chez lui et autorisé à provoquer un génocide.
Cette déclaration universelle doit beaucoup à la révulsion universelle envers le nazisme, le fascisme, le totalitarisme, et même, par notre présence, à l'esprit de la Résistance. Je sentais qu'il fallait faire vite, ne pas être dupe de l'hypocrisie qu'il y avait dans l'adhésion proclamée par les vainqueurs à ces valeurs que tous n'avaient pas l'intention de promouvoir loyalement, mais que nous tentions de leur imposer.
Je ne résiste pas à l'envie de citer l'article 15 de la Déclaration universelle des Droits de l'homme: "Tout individu a droit à une nationalité"; l'article 22: "Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la Sécurité sociale; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité, grâce à l'effort national et à la coopération internationale, compte tenu de l'organisation et des ressources de chaque pays". Et si cette déclaration a une portée déclarative, et non pas juridique, elle n'en a pas moins joué un rôle puissant depuis 1948; on a vu des peuples colonisés s'en saisir dans leur lutte d'indépendance; elle a ensemencé les esprits dans leur combat pour la liberté.
Je constate avec plaisir qu'au cours des dernières décennies se sont multipliés les organisations non gouvernementales, les mouvements sociaux comme Attac (Association pour la taxation des transactions financières), la FIDH (Fédération internationale des Droits de l'homme), Amnesty... qui sont agissants et performants. Il est évident que pour être efficace aujourd'hui, il faut agir en réseau, profiter de tous les moyens modernes de communication. Aux jeunes, je dis: regardez autour de vous, vous y trouverez les thèmes qui justifient votre indignation — le traitement faits aux immigrés, aux sans-papiers, aux Roms. Vous trouverez des situations concrètes qui vous amènent à donner cours à une action citoyenne forte. Cherchez et vous trouverez!
Mon indignation à propos de la Palestine
Aujourd'hui, ma principale indignation concerne la Palestine, la bande de Gaza, la Cisjordanie. Ce conflit est la source même d'une indignation. Il faut absolument lire le rapport Richard Goldstone de septembre 2009 sur Gaza, dans lequel ce juge sud-africain, juif, qui se dit même sioniste, accuse l'armée israélienne d'avoir commis des "actes assimilables à des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, à des crimes contre l'humanité" pendant son opération "Plomb durci" qui a duré trois semaines.
Je suis moi-même retourné à Gaza, en 2009, où j'ai pu entrer avec ma femme grâce à nos passeports diplomatiques afin d'étudier de visu ce que ce rapport disait. Les gens qui nous accompagnaient n'ont pas été autorisés à pénétrer dans la bande de Gaza. Là et en Cisjordanie.
Nous avons aussi visité les camps de réfugiés palestiniens mis en place dès 1948 par l'agence des Nations unies, l'UNRWA, où plus de trois millions de Palestiniens chassés de leurs terres par Israël attendent un retour de plus en plus problématique. Quant à Gaza, c'est une prison à ciel ouvert pour un million et demi de Palestiniens. Une prison où ils s'organisent pour survivre.
Plus encore que les destructions matérielles comme celle de l'hôpital du Croissant rouge par "Plomb durci", c'est le comportement des Gazaouis, leur patriotisme, leur amour de la mer et des plages, leur constante préoccupation du bien-être de leurs enfants, innombrables et rieurs, qui hantent notre mémoire.
Nous avons été impressionnés par leur ingénieuse manière de faire face à toutes les pénuries qui leur sont imposées. Nous les avons vu confectionner des briques faute de ciment pour reconstruire les milliers de maisons détruites par les chars. On nous a confirmé qu'il y avait eu mille quatre cents morts — femmes, enfants, vieillards inclus dans le camp palestinien — au cours de cette opération "Plomb durci" menée par l'armée israélienne, contre seulement cinquante blessés côté israélien. Je partage les conclusions du juge sud-africain. Que des Juifs puissent perpétrer eux-mêmes des crimes de guerre, c'est insupportable. Hélas, l'histoire donne peu d'exemples de peuples qui tirent les leçons de leur propre histoire.
Je sais, le Hamas qui avait gagné les dernières élections législatives n'a pas pu éviter que des rockets soient envoyées sur les villes israéliennes en réponse à la situation d'isolement et de blocus dans laquelle se trouvent les Gazaouis. Je pense bien évidemment que le terrorisme est inacceptable, mais il faut reconnaître que lorsque l'on est occupé avec des moyens militaires infiniment supérieurs aux vôtres, la réaction populaire ne peut pas être que non-violente.
Est-ce que ça sert le Hamas d'envoyer des rockets sur la ville de Sdérot? La réponse est non. Ça ne sert pas sa cause, mais on peut expliquer ce geste par l'exaspération des Gazaouis. Dans la notion d'exaspération, il faut comprendre la violence comme une regrettable conclusion de situations inacceptables pour ceux qui les subissent. Alors, on peut se dire que le terrorisme est une forme d'exaspération. Et que cette exaspération est un terme négatif. Il ne faudrait pas ex-aspérer, il faudrait es-pérer. L'exaspération est un déni de l'espoir. Elle est compréhensible, je dirais presque qu'elle est naturelle, mais pour autant elle n'est pas acceptable. Parce qu'elle ne permet pas d'obtenir les résultats que peut éventuellement produire l'espérance.
La non-violence, le chemin que nous devons apprendre à suivre
Je suis convaincu que l'avenir appartient à la non-violence, à la conciliation des cultures différentes. C'est par cette voie que l'humanité devra franchir sa prochaine étape. Et là, je rejoins Sartre, on ne peut pas excuser les terroristes qui jettent des bombes, on peut les comprendre.
Sartre écrit en 1947: "Je reconnais que la violence sous quelque forme qu'elle se manifeste est un échec. Mais c'est un échec inévitable parce que nous sommes dans un univers de violence. Et s'il est vrai que le recours à la violence reste la violence qui risque de la perpétuer, il est vrai aussi c'est l'unique moyen de la faire cesser."
À quoi j'ajouterais que la non-violence est un moyen plus sûr de la faire cesser. On ne peut pas soutenir les terroristes comme Sartre l'a fait au nom de ce principe pendant la guerre d'Algérie, ou lors de l'attentat des jeux de Munich, en 1972, commis contre des athlètes israéliens. Ce n'est pas efficace et Sartre lui-même finira par s'interroger à la fin de sa vie sur le sens du terrorisme et à douter de sa raison d'être.
Se dire "la violence n'est pas efficace", c'est bien plus important que de savoir si on doit condamner ou pas ceux qui s'y livrent. Le terrorisme n'est pas efficace. Dans la notion d'efficacité, il faut une espérance non-violente. S'il existe une espérance violente, c'est dans la poésie de Guillaume Apollinaire: "Que l'espérance est violente"; pas en politique.
Sartre, en mars 1980, à trois semaines de sa mort, déclarait: "Il faut essayer d'expliquer pourquoi le monde de maintenant, qui est horrible, n'est qu'un moment dans le long développement historique, que l'espoir a toujours été une des forces dominantes des révolutions et des insurrections, et comment je ressens encore l'espoir comme ma conception de l'avenir".
Il faut comprendre que la violence tourne le dos à l'espoir. Il faut lui préférer l'espérance, l'espérance de la non-violence. C'est le chemin que nous devons apprendre à suivre. Aussi bien du côté des oppresseurs que des opprimés, il faut arriver à une négociation pour faire disparaître l'oppression; c'est ce qui permettra de ne plus avoir de violence terroriste. C'est pourquoi il ne faut pas laisser s'accumuler trop de haine.
Le message d'un Mandela, d'un Martin Luther King trouve toute sa pertinence dans un monde qui a dépassé la confrontation des idéologies et le totalitarisme conquérant. C'est un message d'espoir dans la capacité des sociétés modernes à dépasser les conflits par une compréhension mutuelle et une patience vigilante. Pour y parvenir, il faut se fonder sur les droits, dont la violation, quel qu'en soit l'auteur, doit provoquer notre indignation. Il n'y a pas à transiger sur ces droits.
Pour une insurrection pacifique
J'ai noté — et je ne suis pas le seul — la réaction du gouvernement israélien confronté au fait que chaque vendredi les citoyens de Bil'id vont, sans jeter de pierres, sans utiliser la force, jusqu'au mur contre lequel ils protestent. Les autorités israéliennes ont qualifié cette marche de "terrorisme non-violent". Pas mal... Il faut être israélien pour qualifier de terroriste la non-violence. Il faut surtout être embarrassé par l'efficacité de la non-violence qui tient à ce qu'elle suscite l'appui, la compréhension, le soutien de tous ceux qui dans le monde sont les adversaires de l'oppression.
La pensée productiviste, portée par l'Occident, a entraîné le monde dans une crise dont il faut sortir par une rupture radicale avec la fuite en avant du "toujours plus", dans le domaine financier mais aussi dans le domaine des sciences et des techniques. Il est grand temps que le souci d'éthique, de justice, d'équilibre durable devienne prévalent. Car les risques les plus graves nous menacent. Ils peuvent mettre un terme à l'aventure humaine sur une planète qu'elle peut rendre inhabitable pour l'homme.
Mais il reste vrai que d'importants progrès ont été faits depuis 1948: la décolonisation, la fin de l'apartheid, la destruction de l'empire soviétique, la chute du Mur de Berlin. Par contre, les dix premières années du XXIe siècle ont été une période de recul. Ce recul, je l'explique en partie par la présidence américaine de George Bush, le 11 septembre, et les conséquences désastreuses qu'en ont tirées les Etats-Unis, comme cette intervention militaire en Irak.
Nous avons eu cette crise économique, mais nous n'en avons pas davantage initié une nouvelle politique de développement. réchauffement De même, climatique le n'a sommet pas de permis Copenhague d'engager une contre le véritable politique pour la préservation de la planète. Nous sommes à un seuil, entre les horreurs de la première décennie et les possibilités des décennies suivantes.
Mais il faut espérer, il faut toujours espérer. La décennie précédente, celle des années 1990, avait été source de grands progrès. Les Nations unies ont su convoquer des conférences comme celles de Rio sur l'environnement, en 1992; celle de Pékin sur les femmes, en 1995; en septembre 2000, à l'initiative du secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, les 191 pays membres ont adopté la déclaration sur les "Huit objectifs du millénaire pour le développement", par laquelle ils s'engagent notamment à réduire de moitié la pauvreté dans le monde d'ici 2015. Mon grand regret, c'est que ni Obama ni l'Union européenne ne se soient encore manifestés avec ce qui devrait être leur apport pour une phase constructive, s'appuyant sur les valeurs fondamentales.
Comment conclure cet appel à s'indigner? En rappelant encore que, à l'occasion du soixantième anniversaire du Programme du Conseil national de la Résistance, nous disions le 8 mars 2004, nous vétérans des mouvements de Résistance et des forces combattantes de la France libre (1940-1945), que certes "le nazisme est vaincu, grâce au sacrifice de nos frères et soeurs de la Résistance et des Nations unies contre la barbarie fasciste. Mais cette menace n'a pas totalement disparu et notre colère contre l'injustice est toujours intacte". Non, cette menace n'a pas totalement disparu. Aussi, appelons-nous toujours à "une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l'amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous."
À ceux et celles qui feront le XXI' siècle, nous disons avec notre affection: CRÉER, C'EST RÉSISTER. RÉSISTER, C'EST CRÉER
Stéphane Hessel
De ces principes et de ces valeurs, nous avons aujourd'hui plus que jamais besoin. Il nous appartient de veiller tous ensemble à ce que notre société reste une société dont nous soyons fiers: pas cette société des sans-papiers, des expulsions, des soupçons à l'égard des immigrés, pas cette société où l'on remet en cause les retraites, les acquis de la Sécurité sociale, pas cette société où les médias sont entre les mains des nantis, toutes choses que nous aurions refusé de cautionner si nous avions été les véritables héritiers du Conseil National de la Résistance.
A partir de 1945, après un drame atroce, c'est une ambitieuse résurrection à laquelle se livrent les forces présentes au sein du Conseil de la Résistance. Rappelons-le, c'est alors qu'est créée la Sécurité sociale comme la Résistance le souhaitait, comme son programme le stipulait: "Un plan complet de Sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens des moyens d'existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se les procurer par le travail"; "une retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours." Les sources d'énergie, l'électricité et le gaz, les charbonnages, les grandes banques sont nationalisées. C'est ce que ce programme préconisait encore... "le retour à la nation des grands moyens de production monopolisés, fruit du travail commun, des sources d'énergie, des richesses du sous-sol, des compagnies d'assurance et des grandes banques"; "l'instauration d'une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l'éviction des grandes féodalités économiques et financières de la direction de l'économie".
L'intérêt général doit primer sur l'intérêt particulier, le juste partage des richesses créées par le monde du travail primer sur le pouvoir de l'argent. La Résistance propose "une organisation rationnelle de l'économie assurant la subordination des intérêts particuliers à l'intérêt général et affranchie de la dictature professionnelle instaurée à l'image des États fascistes", et le Gouvernement provisoire de la République s'en fait le relais.
Une véritable démocratie a besoin d'une presse indépendante; la Résistance le sait, l'exige, en défendant "la liberté de la presse, son honneur et son indépendance à l'égard de l'État, des puissances d'argent et des influences étrangères." C'est ce que relaient encore les ordonnances sur la presse, dès 1944. Or, c'est bien ce qui est aujourd'hui en danger.
La Résistance en appelait à "la possibilité effective pour tous les enfants français de bénéficier de l'instruction la plus développée", sans discrimination; or, les réformes proposées en 2008 vont à l'encontre de ce projet. De jeunes enseignants, dont je soutiens l'action, ont été jusqu'à refuser de les appliquer et ils ont vu leurs salaires amputés en guise de punition. Ils se sont indignés, ont "désobéi", ont jugé ces réformes trop éloignées de l'idéal de l'école républicaine, trop au service d'une société de l'argent et ne développant plus assez l'esprit créatif et critique.
C'est tout le socle des conquêtes sociales de la Résistance qui est aujourd'hui remis en cause. Le motif de la résistance, c'est l'indignation. On ose nous dire que l'État ne peut plus assurer les coûts de ces mesures citoyennes. Mais comment peut-il manquer aujourd'hui de l'argent pour maintenir et prolonger ces conquêtes alors que la production de richesses a considérablement augmenté depuis la Libération, période où l'Europe était ruinée? Sinon parce que le pouvoir de l'argent, tellement combattu par la Résistance, n'a jamais été aussi grand, insolent, égoïste, avec ses propres serviteurs jusque dans les plus hautes sphères de l'État. Les banques désormais privatisées se montrent d'abord soucieuses de leurs dividendes, et des très haut salaires de leurs dirigeants, pas de l'intérêt général. L'écart entre les plus pauvres et les plus riches n'a jamais été aussi important; et la course à l'argent, la compétition, autant encouragée.
Le motif de base de la Résistance était l'indignation
Nous, vétérans des mouvements de résistance et des forces combattantes de la France libre, nous appelons les jeunes générations à faire vivre, transmettre, l'héritage de la Résistance et ses idéaux. Nous leur disons: prenez le relais, indignez-vous! Les responsables politiques, économiques, intellectuels et l'ensemble de la société ne doivent pas démissionner, ni se laisser impressionner par l'actuelle dictature internationale des marchés financiers qui menace la paix et la démocratie.
Je vous souhaite à tous, à chacun d'entre vous, d'avoir votre motif d'indignation. C'est précieux. Quand quelque chose vous indigne comme j'ai été indigné par le nazisme, alors on devient militant, fort et engagé. On rejoint ce courant de l'histoire et le grand courant de l'histoire doit se poursuivre grâce à chacun. Et ce courant va vers plus de justice, plus de liberté mais pas cette liberté incontrôlée du renard dans le poulailler.
Ces droits, dont la Déclaration universelle a rédigé le programme en 1948, sont universels. Si vous rencontrez quelqu'un qui n'en bénéficie pas, plaignez-le, aidez-le à les conquérir.
Deux visions de l'histoire
Quand j'essaie de comprendre ce qui a causé le fascisme, qui a fait que nous ayons été envahis par lui et par Vichy, je me dis que les possédants, avec leur égoïsme, ont eu terriblement peur de la révolution bolchévique. Ils se sont laissés guider par leurs peurs. Mais si, aujourd'hui comme alors, une minorité active se dresse, cela suffira, nous aurons le levain pour que la pâte lève.
Certes, l'expérience d'un très vieux comme moi, né en 1917, se différencie de l'expérience des jeunes d'aujourd'hui. Je demande souvent à des professeurs de collège la possibilité d'intervenir auprès de leurs élèves, et je leur dis: vous n'avez pas les mêmes raisons évidentes de vous engager. Pour nous, résister, c'était ne pas accepter l'occupation allemande, la défaite. C'était relativement simple. Simple comme ce qui a suivi, la décolonisation. Puis la guerre d'Algérie. Il fallait que l'Algérie devienne indépendante, c'était évident. Quant à Staline, nous avons tous applaudi à la victoire de l'Armée rouge contre les nazis, en 1943. Mais déjà lorsque nous avions eu connaissance des grands procès staliniens de 1935, et même s'il fallait garder une oreille ouverte vers le communisme pour contrebalancer le capitalisme américain, la nécessité de s'opposer à cette forme insupportable de totalitarisme s'était imposée comme une évidence.
Ma longue vie m'a donné une succession de raisons de m'indigner. Ces raisons sont nées moins d'une émotion que d'une volonté d'engagement. Le jeune normalien que j'étais a été très marqué par Sartre, un aîné condisciple. La Nausée, Le Mur, pas L 'Être et le néant, ont été très importants dans la formation de ma pensée. Sartre nous a appris à nous dire: "Vous êtes responsables en tant qu'individus." C'était un message libertaire. La responsabilité de l'homme qui ne peut s'en remettre ni à un pouvoir ni à un dieu. Au contraire, il faut s'engager au nom de sa responsabilité de personne humaine.
Quand je suis entré à l'École normale de la rue d'Ulm, à Paris, en 1939, j'y entrais comme fervent disciple du philosophe Hegel, et je suivais le séminaire de Maurice Merleau-Ponty. Son enseignement explorait l'expérience concrète, celle du corps et de ses relations avec le sens, grand singulier face au pluriel des sens. Mais mon optimisme naturel, qui veut que tout ce qui est souhaitable soit possible, me portait plutôt vers Hegel.
L'hégélianisme interprète la longue histoire de l'humanité comme ayant un sens : c'est la liberté de l'homme progressant étape par étape. L'histoire est faite de chocs successifs, c'est la prise en compte de défis. L'histoire des sociétés progresse, et au bout, l'homme ayant atteint sa liberté complète, nous avons l'État démocratique dans sa forme idéale.
Il existe bien sûr une autre conception de l'histoire. Les progrès faits par la liberté, la compétition, la course au "toujours plus", cela peut être vécu comme un ouragan destructeur. C'est ainsi que la représente un ami de mon père, l'homme qui a partagé avec lui la tâche de traduire en allemand À la Recherche du temps perdu de Marcel Proust. C'est le philosophe allemand Walter Benjamin. Il avait tiré un message pessimiste d'un tableau du peintre suisse, Paul Klee, l'Angelus Novus, où la figure de l'ange ouvre les bras comme pour contenir et repousser une tempête qu'il identifie avec le progrès. Pour Benjamin qui se suicidera en septembre 1940 pour fuir le nazisme, le sens de l'histoire, c'est le cheminement irrésistible de catastrophe en catastrophe.
L'indifférence: la pire des attitudes
C'est vrai, les raisons de s'indigner peuvent paraître aujourd'hui moins nettes ou le monde trop complexe. Qui commande, qui décide? Il n'est pas toujours facile de distinguer entre tous les courants qui nous gouvernent. Nous n'avons plus affaire à une petite élite dont nous comprenons clairement les agissements. C'est un vaste monde, dont nous sentons bien qu'il est interdépendant.
Nous vivons dans une inter connectivité comme jamais encore il n'en a existé. Mais dans ce monde, il y a des choses insupportables. Pour le voir, il faut bien regarder, chercher.
Je dis aux jeunes: cherchez un peu, vous allez trouver. La pire des attitudes est l'indifférence, dire "je n'y peux rien, je me débrouille". En vous comportant ainsi, vous perdez l'une des composantes essentielles qui fait l'humain. Une des composantes indispensables: la faculté d'indignation et l'engagement qui en est la conséquence.
On peut déjà identifier deux grands nouveaux défis:
1. L'immense écart qui existe entre les très pauvres et les très riches et qui ne cesse de s'accroître. C'est une innovation des XX` et XXI` siècle. Les très pauvres dans le monde d'aujourd'hui gagnent à peine deux dollars par jour. On ne peut pas laisser cet écart se creuser encore. Ce constat seul doit susciter un engagement.
2. Les droits de l'homme et l'état de la planète. J'ai eu la chance après la Libération d'être associé à la rédaction de la Déclaration universelle des droits de l'homme adoptée par l'Organisation des Nations unies, le 10 décembre 1948, à Paris, au palais de Chaillot. C'est au titre de chef de cabinet de Henri Laugier, secrétaire général adjoint de l'ONU, et secrétaire de la Commission des Droits de l'homme que j'ai, avec d'autres, été amené à participer à la rédaction de cette déclaration.
Je ne saurais oublier, dans son élaboration, le rôle de René Cassin, commissaire national à la Justice et à l'Éducation du gouvernement de la France libre, à Londres, en 1941, qui fut prix Nobel de la paix en 1968, ni celui de Pierre Mendès France au sein du Conseil économique et social à qui les textes que nous élaborions étaient soumis, avant d'être examinés par la Troisième commission de l'assemblée générale, en charge des questions sociales, humanitaires et culturelles. Elle comptait les cinquantequatre États membres, à l'époque, des Nations unies, et j'en assurais le secrétariat. C'est à René Cassin que nous devons le terme de droits "universels" et non "internationaux" comme le proposaient nos amis anglo-saxons. Car là est bien l'enjeu au sortir de la seconde guerre mondiale: s'émanciper des menaces que le totalitarisme a fait peser sur l'humanité.
Pour s'en émanciper, il faut obtenir que les États membres de l'ONU s'engagent à respecter ces droits universels. C'est une manière de déjouer l'argument de pleine souveraineté qu'un État peut faire valoir alors qu'il se livre à des crimes contre l'humanité sur son sol. Ce fut le cas d'Hitler qui s'estimait maître chez lui et autorisé à provoquer un génocide.
Cette déclaration universelle doit beaucoup à la révulsion universelle envers le nazisme, le fascisme, le totalitarisme, et même, par notre présence, à l'esprit de la Résistance. Je sentais qu'il fallait faire vite, ne pas être dupe de l'hypocrisie qu'il y avait dans l'adhésion proclamée par les vainqueurs à ces valeurs que tous n'avaient pas l'intention de promouvoir loyalement, mais que nous tentions de leur imposer.
Je ne résiste pas à l'envie de citer l'article 15 de la Déclaration universelle des Droits de l'homme: "Tout individu a droit à une nationalité"; l'article 22: "Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la Sécurité sociale; elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité, grâce à l'effort national et à la coopération internationale, compte tenu de l'organisation et des ressources de chaque pays". Et si cette déclaration a une portée déclarative, et non pas juridique, elle n'en a pas moins joué un rôle puissant depuis 1948; on a vu des peuples colonisés s'en saisir dans leur lutte d'indépendance; elle a ensemencé les esprits dans leur combat pour la liberté.
Je constate avec plaisir qu'au cours des dernières décennies se sont multipliés les organisations non gouvernementales, les mouvements sociaux comme Attac (Association pour la taxation des transactions financières), la FIDH (Fédération internationale des Droits de l'homme), Amnesty... qui sont agissants et performants. Il est évident que pour être efficace aujourd'hui, il faut agir en réseau, profiter de tous les moyens modernes de communication. Aux jeunes, je dis: regardez autour de vous, vous y trouverez les thèmes qui justifient votre indignation — le traitement faits aux immigrés, aux sans-papiers, aux Roms. Vous trouverez des situations concrètes qui vous amènent à donner cours à une action citoyenne forte. Cherchez et vous trouverez!
Mon indignation à propos de la Palestine
Aujourd'hui, ma principale indignation concerne la Palestine, la bande de Gaza, la Cisjordanie. Ce conflit est la source même d'une indignation. Il faut absolument lire le rapport Richard Goldstone de septembre 2009 sur Gaza, dans lequel ce juge sud-africain, juif, qui se dit même sioniste, accuse l'armée israélienne d'avoir commis des "actes assimilables à des crimes de guerre et peut-être, dans certaines circonstances, à des crimes contre l'humanité" pendant son opération "Plomb durci" qui a duré trois semaines.
Je suis moi-même retourné à Gaza, en 2009, où j'ai pu entrer avec ma femme grâce à nos passeports diplomatiques afin d'étudier de visu ce que ce rapport disait. Les gens qui nous accompagnaient n'ont pas été autorisés à pénétrer dans la bande de Gaza. Là et en Cisjordanie.
Nous avons aussi visité les camps de réfugiés palestiniens mis en place dès 1948 par l'agence des Nations unies, l'UNRWA, où plus de trois millions de Palestiniens chassés de leurs terres par Israël attendent un retour de plus en plus problématique. Quant à Gaza, c'est une prison à ciel ouvert pour un million et demi de Palestiniens. Une prison où ils s'organisent pour survivre.
Plus encore que les destructions matérielles comme celle de l'hôpital du Croissant rouge par "Plomb durci", c'est le comportement des Gazaouis, leur patriotisme, leur amour de la mer et des plages, leur constante préoccupation du bien-être de leurs enfants, innombrables et rieurs, qui hantent notre mémoire.
Nous avons été impressionnés par leur ingénieuse manière de faire face à toutes les pénuries qui leur sont imposées. Nous les avons vu confectionner des briques faute de ciment pour reconstruire les milliers de maisons détruites par les chars. On nous a confirmé qu'il y avait eu mille quatre cents morts — femmes, enfants, vieillards inclus dans le camp palestinien — au cours de cette opération "Plomb durci" menée par l'armée israélienne, contre seulement cinquante blessés côté israélien. Je partage les conclusions du juge sud-africain. Que des Juifs puissent perpétrer eux-mêmes des crimes de guerre, c'est insupportable. Hélas, l'histoire donne peu d'exemples de peuples qui tirent les leçons de leur propre histoire.
Je sais, le Hamas qui avait gagné les dernières élections législatives n'a pas pu éviter que des rockets soient envoyées sur les villes israéliennes en réponse à la situation d'isolement et de blocus dans laquelle se trouvent les Gazaouis. Je pense bien évidemment que le terrorisme est inacceptable, mais il faut reconnaître que lorsque l'on est occupé avec des moyens militaires infiniment supérieurs aux vôtres, la réaction populaire ne peut pas être que non-violente.
Est-ce que ça sert le Hamas d'envoyer des rockets sur la ville de Sdérot? La réponse est non. Ça ne sert pas sa cause, mais on peut expliquer ce geste par l'exaspération des Gazaouis. Dans la notion d'exaspération, il faut comprendre la violence comme une regrettable conclusion de situations inacceptables pour ceux qui les subissent. Alors, on peut se dire que le terrorisme est une forme d'exaspération. Et que cette exaspération est un terme négatif. Il ne faudrait pas ex-aspérer, il faudrait es-pérer. L'exaspération est un déni de l'espoir. Elle est compréhensible, je dirais presque qu'elle est naturelle, mais pour autant elle n'est pas acceptable. Parce qu'elle ne permet pas d'obtenir les résultats que peut éventuellement produire l'espérance.
La non-violence, le chemin que nous devons apprendre à suivre
Je suis convaincu que l'avenir appartient à la non-violence, à la conciliation des cultures différentes. C'est par cette voie que l'humanité devra franchir sa prochaine étape. Et là, je rejoins Sartre, on ne peut pas excuser les terroristes qui jettent des bombes, on peut les comprendre.
Sartre écrit en 1947: "Je reconnais que la violence sous quelque forme qu'elle se manifeste est un échec. Mais c'est un échec inévitable parce que nous sommes dans un univers de violence. Et s'il est vrai que le recours à la violence reste la violence qui risque de la perpétuer, il est vrai aussi c'est l'unique moyen de la faire cesser."
À quoi j'ajouterais que la non-violence est un moyen plus sûr de la faire cesser. On ne peut pas soutenir les terroristes comme Sartre l'a fait au nom de ce principe pendant la guerre d'Algérie, ou lors de l'attentat des jeux de Munich, en 1972, commis contre des athlètes israéliens. Ce n'est pas efficace et Sartre lui-même finira par s'interroger à la fin de sa vie sur le sens du terrorisme et à douter de sa raison d'être.
Se dire "la violence n'est pas efficace", c'est bien plus important que de savoir si on doit condamner ou pas ceux qui s'y livrent. Le terrorisme n'est pas efficace. Dans la notion d'efficacité, il faut une espérance non-violente. S'il existe une espérance violente, c'est dans la poésie de Guillaume Apollinaire: "Que l'espérance est violente"; pas en politique.
Sartre, en mars 1980, à trois semaines de sa mort, déclarait: "Il faut essayer d'expliquer pourquoi le monde de maintenant, qui est horrible, n'est qu'un moment dans le long développement historique, que l'espoir a toujours été une des forces dominantes des révolutions et des insurrections, et comment je ressens encore l'espoir comme ma conception de l'avenir".
Il faut comprendre que la violence tourne le dos à l'espoir. Il faut lui préférer l'espérance, l'espérance de la non-violence. C'est le chemin que nous devons apprendre à suivre. Aussi bien du côté des oppresseurs que des opprimés, il faut arriver à une négociation pour faire disparaître l'oppression; c'est ce qui permettra de ne plus avoir de violence terroriste. C'est pourquoi il ne faut pas laisser s'accumuler trop de haine.
Le message d'un Mandela, d'un Martin Luther King trouve toute sa pertinence dans un monde qui a dépassé la confrontation des idéologies et le totalitarisme conquérant. C'est un message d'espoir dans la capacité des sociétés modernes à dépasser les conflits par une compréhension mutuelle et une patience vigilante. Pour y parvenir, il faut se fonder sur les droits, dont la violation, quel qu'en soit l'auteur, doit provoquer notre indignation. Il n'y a pas à transiger sur ces droits.
Pour une insurrection pacifique
J'ai noté — et je ne suis pas le seul — la réaction du gouvernement israélien confronté au fait que chaque vendredi les citoyens de Bil'id vont, sans jeter de pierres, sans utiliser la force, jusqu'au mur contre lequel ils protestent. Les autorités israéliennes ont qualifié cette marche de "terrorisme non-violent". Pas mal... Il faut être israélien pour qualifier de terroriste la non-violence. Il faut surtout être embarrassé par l'efficacité de la non-violence qui tient à ce qu'elle suscite l'appui, la compréhension, le soutien de tous ceux qui dans le monde sont les adversaires de l'oppression.
La pensée productiviste, portée par l'Occident, a entraîné le monde dans une crise dont il faut sortir par une rupture radicale avec la fuite en avant du "toujours plus", dans le domaine financier mais aussi dans le domaine des sciences et des techniques. Il est grand temps que le souci d'éthique, de justice, d'équilibre durable devienne prévalent. Car les risques les plus graves nous menacent. Ils peuvent mettre un terme à l'aventure humaine sur une planète qu'elle peut rendre inhabitable pour l'homme.
Mais il reste vrai que d'importants progrès ont été faits depuis 1948: la décolonisation, la fin de l'apartheid, la destruction de l'empire soviétique, la chute du Mur de Berlin. Par contre, les dix premières années du XXIe siècle ont été une période de recul. Ce recul, je l'explique en partie par la présidence américaine de George Bush, le 11 septembre, et les conséquences désastreuses qu'en ont tirées les Etats-Unis, comme cette intervention militaire en Irak.
Nous avons eu cette crise économique, mais nous n'en avons pas davantage initié une nouvelle politique de développement. réchauffement De même, climatique le n'a sommet pas de permis Copenhague d'engager une contre le véritable politique pour la préservation de la planète. Nous sommes à un seuil, entre les horreurs de la première décennie et les possibilités des décennies suivantes.
Mais il faut espérer, il faut toujours espérer. La décennie précédente, celle des années 1990, avait été source de grands progrès. Les Nations unies ont su convoquer des conférences comme celles de Rio sur l'environnement, en 1992; celle de Pékin sur les femmes, en 1995; en septembre 2000, à l'initiative du secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, les 191 pays membres ont adopté la déclaration sur les "Huit objectifs du millénaire pour le développement", par laquelle ils s'engagent notamment à réduire de moitié la pauvreté dans le monde d'ici 2015. Mon grand regret, c'est que ni Obama ni l'Union européenne ne se soient encore manifestés avec ce qui devrait être leur apport pour une phase constructive, s'appuyant sur les valeurs fondamentales.
Comment conclure cet appel à s'indigner? En rappelant encore que, à l'occasion du soixantième anniversaire du Programme du Conseil national de la Résistance, nous disions le 8 mars 2004, nous vétérans des mouvements de Résistance et des forces combattantes de la France libre (1940-1945), que certes "le nazisme est vaincu, grâce au sacrifice de nos frères et soeurs de la Résistance et des Nations unies contre la barbarie fasciste. Mais cette menace n'a pas totalement disparu et notre colère contre l'injustice est toujours intacte". Non, cette menace n'a pas totalement disparu. Aussi, appelons-nous toujours à "une véritable insurrection pacifique contre les moyens de communication de masse qui ne proposent comme horizon pour notre jeunesse que la consommation de masse, le mépris des plus faibles et de la culture, l'amnésie généralisée et la compétition à outrance de tous contre tous."
À ceux et celles qui feront le XXI' siècle, nous disons avec notre affection: CRÉER, C'EST RÉSISTER. RÉSISTER, C'EST CRÉER
Stéphane Hessel
I governi, per definizione, non hanno coscienza. Il mondo in cui vivo mi disgusta, ma mi sento solidale con gli uomini che soffrono.
Albert Camus
Albert Camus
93 anni. E' un po' l'ultima tappa. La fine non è più lontana. Quale fortuna di potere approfittare per ricordare ciò che ha servito di zoccolo al mio impegno politico: gli anni della resistenza ed il programma elaborato sessantasei anni fa per il Consiglio Nazionale della Resistenza! È a Jean Moulin che dobbiamo, nella cornice di quel Consiglio, la riunione di tutti i componenti della Francia occupata, i movimenti, i partiti, i sindacati, per proclamare la loro adesione alla Francia combattente ed al solo capo che si riconosceva: il Generale de Gaulle. Da Londra, dove lo avevo raggiunto nel marzo 1941, apprendevo che questo Consiglio aveva messo a punto un programma, l'aveva adottato il 15 marzo 1944 e proposto per la Francia liberata un insieme di principi e di valori sui quali sarebbe stata riposta la democrazia moderna del nostro paese.
Di questi principi e di questi valori, abbiamo oggi più che mai bisogno. Dobbiamo badare tutti insieme che la nostra società resti una società di cui possiamo essere fieri: non questa società dei clandestini, delle espulsioni, dei sospetti al riguardo degli immigrati, non questa società dove si rimettono in discussione le pensioni, le conquiste della Sicurezza sociale, non questa società dove i media sono nelle mani dei benestanti, tutte cose che avremmo negato di garantire se fossimo stati i veri eredi del Consiglio Nazionale della Resistenza.
A partire dal 1945, dopo un dramma atroce, è ad una ambiziosa risurrezione che si dedicano le forze presenti in seno al Consiglio della Resistenza. Ricordiamolo, allora fu creata la Sicurezza sociale come la Resistenza l'aveva prefigurata, come il suo programma la definiva: ”Un piano completo di Sicurezza sociale, mirante ad assicurare a tutti i cittadini i mezzi di sussistenza, in tutti i casi in cui sono incapaci di procurarseli con il lavoro”; “Una pensione che permetta ai vecchi lavoratori di finire dignitosamente i loro giorni”. Le fonti energetiche, l'elettricità e il gas, le miniere di carbone, le grandi, banche sono nazionalizzate. È ciò che questo programma raccomandava ancora... "il ritorno alIa nazione dei grande mezzi di produzione monopolizzata, frutto del lavoro comune, delle sorgenti di energia, delle ricchezze del sottosuolo, delle compagnie di assicurazione e delle grandi banche; “L'instaurazione di una vera democrazia economica e sociale, implica l'esclusione dei grandi feudi economici e finanziari nella direzione dell'economia".
L’interesse generale deve prevalere sulI'interesse particolare, l’equa distribuzione delle ricchezze create dal mondo del lavoro prevalere sul potere del denaro. La Resistenza propose “un'organizzazione razionale dell'economia che assicuri la subordinazione degli interessi particolari all’interesse generale, affrancata dalla dittatura professionale instaurata sull’esempio degli Stati fascisti”; ed il Governo provvisorio della Repubblica se n’è fatto portavoce.
Una vera democrazia ha bisogno di una stampa indipendente; la Resistenza lo sa, lo esige, difendendo "la libertà della stampa, il suo onore e la sua indipendenza rispetto allo Stato, al potere del denaro e alle influenze straniere”. Questo è ciò che riferiscono ancora le ordinanze sulla stampa, fin da 1944. Ora è proprio questo che oggi è in pericolo.
La Resistenza ci chiamava alla “possibilità effettiva per tutti i bambini francesi di beneficiare dell'istruzione più avanzata”, senza discriminazione; ora, le riforme proposte nel 2008 vanno contro questo progetto. Dei giovani insegnanti di cui sostengo l'azione, si sono rifiutati di applicarle ed hanno visto i loro stipendi mutilati a guisa di punizione. Si sono indignati, hanno “disubbidito", hanno giudicato queste riforme troppo lontane dall'ideale della scuola repubblicana, troppo al servizio di una società del denaro e non più in grado di sviluppare lo spirito creativo e critico.
È tutto lo zoccolo delle conquiste sociali della Resistenza che è rimesso oggi in discussione. Movente della resistenza è l'indignazione. C'è chi ha il coraggio di sostenere che lo stato non può assicurare più i costi di queste misure civili e sociali. Ma come può mancare oggi il denaro per mantenere e prolungare queste conquiste dal momento che la produzione di ricchezze è aumentata considerevolmente dalla Liberazione, periodo in cui l'Europa era in rovina? Se non perché il potere del denaro, così combattuto dalla Resistenza, non è stato mai tanto grande, insolente, egoista, coi suoi propri servitori fino alle più alte sfere dello stato. Le banche oramai privatizzate si mostrano in primo luogo preoccupate dei loro dividendi, e dei cospicui stipendi dei loro dirigenti, non dell'interesse generale. La distanza tra i più poveri e i più ricchi non è stata mai tanto rilevante; e la corsa al denaro, la competizione, tanto incoraggiata.
Il motivo di base della Resistenza era l'indignazione
Noi, veterani dei movimenti di resistenza e delle forze combattenti della Francia libera, chiamiamo le giovani generazioni a far rivivere, trasmettere, l'eredità della Resistenza ed i suoi ideali. Diciamo loro: prendete il testimone, indignatevi! I responsabili politici, economici, intellettuali e l'insieme della società non devono disorientarsi, né lasciarsi impressionare dall'attuale dittatura internazionale dei mercati finanziari che minaccia la pace e la democrazia.
Auguro a tutti voi, a ciascuno di voi, di avere il vostro motivo di indignazione. È una cosa preziosa. Quando qualche cosa vi indigna come sono stato indignato io per il nazismo, allora si diventa militante, forte ed impegnato. Si raggiunge la corrente della storia e la grande corrente della storia deve proseguire grazie a ciascuno. E questa corrente va nel senso di una maggiore giustizia, di più libertà ma non questa libertà incontrollata della volpe nel pollaio.
Questi diritti di cui la Dichiarazione universale ha redatto il programma nel 1948, sono universali. Se incontrate qualcuno che non ne beneficia, compiangetelo, aiutatelo a conquistarli.
Due visioni della storia
Quando provo a comprendere ciò che ha causato il fascismo che ha fatto sì che fossimo invasi e conoscessimo Vichy, mi dico che i possidenti, col loro egoismo, hanno avuto terribilmente paura della rivoluzione bolscevica. Essi si sono lasciati guidare dalle loro paure. Ma se, oggi come allora, una minoranza attiva si solleva, ciò basterà, avremo il lievito affinché la pasta gonfi.
Certo, l'esperienza di uno molto anziano come me, nato nel 1917, si differenzia dall’esperienza dei giovani di oggi. Chiedo spesso ai professori dei licei di poter dialogare con i loro alunni, e dico loro: voi non avete le stesse ragioni evidenti di impegnarvi. Per noi, resistere, era non accettare l'occupazione tedesca, la disfatta. Era relativamente semplice. Semplice come ciò che ne è seguito, la decolonizzazione. Poi la guerra d'Algeria. Occorreva che l'Algeria diventasse indipendente, era evidente. In quanto a Stalin, abbiamo applaudito tutti alla vittoria dell'armata rossa contro i nazisti, nel 1943. Ma già da quando avevamo avuto conoscenza dei grande processi stalinisti del 1935, ed anche se bisognava mantenere un orecchio aperto verso il comunismo per controbilanciare il capitalismo americano, la necessità di opporsi a questa forma insopportabile di totalitarismo si era imposta come un'evidenza.
La mia lunga vita mi ha dato una sequela di ragioni per indignarmi. Queste ragioni sono state prodotte più da una volontà di impegno che da un'emozione. Il giovane normale che ero, era stato molto segnato da Sartre, un compagno maggiore. La Nausea, Il Muro, non L’essere e il nulla, sono stati molto importanti nella formazione del mio pensiero. Sartre ci ricordato: "Voi siete responsabili in quanto individui". Era un messaggio libertario. La responsabilità dell’uomo che non può affidarsi né ad un potere né ad un dio. Al contrario, bisogna impegnarsi in nome della propria responsabilità di persona umana.
Quando mi sono iscritto alla scuola normale di via d’Ulm, a Parigi, nel 1939, io ci entravo come fervente discepolo del filosofo Hegel, e seguivo il seminario di Maurice Merleau-Ponty. Il suo insegnamento esplorava l’esperienza concreta, quella del corpo e delle sue relazioni col senso, grande singolare faccia al plurale dei sensi. Ma il mio ottimismo naturale, che vuole che tutto ciò che è augurabile sia possibile, mi portava piuttosto verso Hegel.
La filosofia hegeliana interpreta la lunga storia dell’umanità come avente un senso: è la libertà dell’uomo che progredisce tappa dopo tappa. La storia è fatta di shock successivi, è la messa in conto di sfide. La storia delle società progredisce, e infine, quando l’uomo ha raggiunto la sua piena espressione, abbiamo lo stato democratico nella sua forma ideale.
Esiste certamente un’altra concezione della storia. I progressi ottenuti nella libertà, la competizione, la corsa, al "sempre di più", tutto questo può essere vissuto come un uragano distruttivo. Così lo rappresenta un amico di mio padre, l’uomo che ha diviso con lui il compito di tradurre in tedesco À la Recherche du temps perdu di Marcel Proust.
È il filosofo tedesco Walter Benjamin. Egli aveva tratto un messaggio pessimista da un quadro del pittore svizzero Paul Klee, l'Angelus Novus, dove la figura dell’angelo apre le braccia come per contenere e respingere una tempesta che identifica col progresso. Per Benjamin che si suiciderà nel settembre 1940 per sfuggire al nazismo, il senso della storia è l'avanzamento irresistibile di catastrofe in catastrofe.
L’indifferenza: il peggiore degli atteggiamenti
È vero, le ragioni di indignarsi possono sembrare oggi meno nette o il mondo troppo complesso. Chi comanda, chi decide? Non è sempre facile distinguere tra tutte le forze che ci governano. Non si tratta più di una piccola elite di cui comprendiamo chiaramente l’operato. È un vasto mondo che sappiamo bene essere interdipendente.
Viviamo in una interconnettività come non era mai esistita. Ma in questo mondo ci sono delle cose insopportabili. Per vederle, bisogna ben guardare, cercare.
Dico ai giovani: cercate un poco, andate a trovare. Il peggiore degli atteggiamenti è l’indifferenza, dire “io non posso niente, me ne infischio". Comportandovi così, perdete una delle componenti essenziali che ci fa essere uomini. Una delle componenti indispensabili: la facoltà di indignazione e l’impegno che ne è la diretta conseguenza.
Si possono identificare già due grandi nuove sfide:
1. L’immenso scarto che esiste tra i molto poveri ed i troppo ricchi e che non cessa di aumentare. Questo è un prodotto del XX e del XXI secolo. I molto poveri nel mondo d’oggi guadagnano appena due dollari al giorno. Non si può lasciare che questa forbice si allarghi ancora. Questa constatazione sola deve suscitare un impegno.
2. I diritti dell’uomo e lo stato del pianeta. Ho avuto la fortuna dopo la Liberazione di essere associato alla redazione della Dichiarazione universale dei diritti dell’uomo adottata dall’Organizzazione delle Nazioni unite, il 10 dicembre 1948, a Parigi, al palazzo di Chaillot. Nella funzione di capo di gabinetto di Henri Laugier, segretario generale aggiunto dell’ONU, e di segretario della Commissione dei Diritti dell’uomo sono stato ammsso, con altri, a partecipare alla redazione di questa dichiarazione.
Non potrei dimenticare, nella sua elaborazione, il ruolo di René Cassin, commissario nazionale alla Giustizia e all'educazione del governo della Francia libera, a Londra, nel 1941, premio Nobel della pace nel 1968; né quello di Pierre Mendès France in seno al Consiglio economico e sociale cui i testi che elaboravamo erano sottoposti, prima di essere esaminati dalla Terza commissione dell'assemblea generale, responsabile delle questioni sociali, umanitarie e culturali. Essa contava i cinquantaquattro Stati membri, all'epoca, delle Nazioni unite, ed io ne assicuravo la segreteria. È a René Cassin che dobbiamo il termine di diritti “universali” e non “internazionali” come proponevano i nostri amici anglosassoni. Perché è proprio lì la scommessa a uscire dalla seconda guerra mondiale: emanciparsi dalle minacce che il totalitarismo ha fatto pesare sull’umanità.
Per emanciparsi, bisogna ottenere che gli Stati membri dell’ONU si impegnino a rispettare questi diritti universali. È un modo di sventare l'argomento della piena sovranità che uno Stato può far valere mentre si dedica ai crimini contro l'umanità sul suo suolo. Questo fu il caso di Hitler che si stimava padrone di se stesso ed autorizzato a provocare un genocidio.
Questa dichiarazione universale deve molto alla repulsione universale contro il nazismo, il fascismo, il totalitarismo, e inoltre, per la nostra presenza, allo spirito della Resistenza. Sentivo che bisognava fare rapidamente, non lasciarsi ingannare dall’ipocrisia che c'era nell'adesione proclamata dai vincitori a questi valori che non tutti avevano l'intenzione di promuovere in modo leale, ma che noi tentavamo di imporre loro.
Non resisto alla voglia di citare l’articolo 15 della Dichiarazione universale dei Diritti dell’uomo: "ogni individuo ha diritto ad una nazionalità"; l’articolo 22: “Ciascuno, in quanto membro della società, ha diritto alla Sicurezza sociale; essa è finalizzata ad ottenere la soddisfazione dei diritti economici, sociali e culturali indispensabili alla sua dignità ed al libero sviluppo della sua personalità, grazie allo sforzo nazionale ed alla cooperazione internazionale, tenuto conto dell’organizzazione e delle risorse di ciascun paese”. E se questa dichiarazione ha una portata dichiarativa, e non giuridica, non ha giocato un ruolo meno importante dopo il 1948; si sono visti popoli colonizzati impadronirsene nella loro lotta di indipendenza; ha inseminato gli spiriti nella lotta per la libertà.
Constato con piacere che nel corso degli ultimi decenni si sono moltiplicate le organizzazioni non governative, i movimenti sociali come Attac (Associazione per la tassazione delle transazioni finanziarie), il FIDH (Federazione internazionale dei Diritti dell’uomo), Amnesty... che sono attive e ad alto rendimento. È evidente che per essere efficaci oggi, bisogna agire in rete, approfittare di tutti i mezzi moderni di comunicazione.
Ai giovani, dico: guardate intorno a voi, troverete i temi che giustificano la vostra indignazione – il trattamento riservato agli immigrati, agli illegali, ai Roms. Troverete delle situazioni concrete che vi porteranno a dare corso ad un'azione forte di impegno civile e sociale. Cercate e troverete!
La mia indignazione a proposito della Palestina
Oggi, la mia principale indignazione riguarda la Palestina, la striscia di Gaza, la Cisgiordania. Questo conflitto è causa per me di grande indignazione. Occorre assolutamente leggere il rapporto Goldstone del settembrc 2009 su Gaza, nel quale questo giudice sud-africano, ebreo che si dice anche sionista, accusa l'esercito israeliano di avere commesso, durante l’operazione "Piombo fuso" durata tre settimane, “atti assimilabili a crimini di guerra e forse, in certe circostanze, a crimini contro l’umanità”.
Io stesso sono tornato a Gaza, nel 2009, dove sono potuto entrare con la mia donna grazie ai nostri passaporti diplomatici, per valutare de visu ciò che questo rapporto sosteneva. Le persone che ci accompagnavano non sono state autorizzate ad addentrarsi nella striscia di Gaza e in Cisgiordania.
Abbiamo visitato anche i campi di profughi palestinesi assegnati fin da 1948 dall’Agenzia delle Nazioni unite, l’UNRWA, dove più di tre milioni di Palestinesi, cacciati dalle loro terre da parte d'Israele, aspettano un rientro sempre più problematico. In quanto a Gaza, è una prigione a cielo aperto per un milione e mezzo di Palestinesi. Una prigione dove si organizzano per sopravvivere.
Più delle distruzioni materiali come quella dell'ospedale della Mezzaluna rossa da parte di "Piombo fuso", è il comportamento degli abitanti di Gaza, il loro patriottismo, il loro amore del mare e delle spiagge, la loro costante preoccupazione del benessere dei loro bambini, innumerevoli e ridenti, che persiste nella nostra memoria.
Siamo stati impressionati dal loro ingegnoso modo di fare fronte a tutte le penurie che devono sopportare. Li abbiamo visti preparare dei mattoni senza cemento per ricostruire le migliaia di case distrutte dai carri. C'è stato confermato che durante l’operazione “Piombo fuso" condotta dall’esercito israeliano, ci sono stati millequattrocento morti - donne, bambini, vecchi confinati nel campo palestinese - contro solamente cinquanta feriti israeliani. Condivido le conclusioni del giudice sud-africano. Che gli Ebrei possano perpetrare, proprio loro, dei crimini di guerra, è insopportabile. Ahimè, la storia offre pochi esempi di popoli che traggano insegnamento dalla propria storia.
Lo so, Hamas che ha vinto le ultime elezioni legislative non ha saputo evitare che fossero lanciati razzi sulle città israeliane in risposta alla situazione di isolamento e di blocco nella quale si trovano gli abitanti di Gaza. Penso evidentemente che il terrorismo sia inaccettabile, ma bisogna riconoscere che quando si è occupati con mezzi militari infinitamente superiori a quelli di cui si dispone, la reazione popolare non può che essere violenta.
Torna utile ad Hamas lanciare razzi sulla città di Sdérot? La risposta è no. Ciò non favorisce la sua causa, ma questo gesto si può spiegare con l’esasperazione degli abitanti di Gaza. Nella nozione di esasperazione, bisogna comprendere la violenza come una spiacevole conclusione di situazioni inaccettabili per coloro che le subiscono. Allora, si può dire che il terrorismo è una forma di esasperazione. E che questa esasperazione è un termine negativo. Non si dovrebbe esasperare, occorrerebbe sperare. L’esasperazione nasce da una negazione di speranza. Comprensibile, direi quasi naturale, ma ugualmente inaccettabile. Perché non permette di ottenere i risultati che può eventualmente produrre la speranza.
La non-violenza, la strada che dobbiamo imparare a seguire
Sono convinto che il futuro appartiene alla nonviolenza, alla conciliazione tra le culture differenti. È per questa via che l'umanità dovrà superare il suo prossimo traguardo. In ciò sono d’accordo con Sartre, non possiamo giustificare i terroristi che gettano bombe, li possiamo solo comprendere.
Sartre nel 194l scrive: “Riconosco che la violenza sotto qualunque forma si manifesti è un insuccesso. Ma è un insuccesso inevitabile perché viviamo in un universo di violenza. E se è vero che col ricorso alla violenza resta la violenza che rischia di perpetuarsi, è anche vero che è l'unico modo per farla cessare”.
Al che aggiungerei che la non-violenza è un mezzo più sicuro per farla cessare. Non si possono sostenere i terroristi in nome di questo principio, come ha fatto Sartre durante la guerra d'Algeria o all'epoca dell'attentato contro gli atleti israeliani durante i giochi di Monaco del 1972. Non è efficace e Sartre finirà per interrogarsi alla fine della sua vita sul senso del terrorismo e a dubitare della sua ragion d'essere.
Dire “la violenza non è efficace", è più importante che sapere se dobbiamo condannare o no coloro che si dedicano ad essa. Il terrorismo non è efficace. Nella nozione di efficacia, occorre una speranza non violenta. Una speranza violenta si trova nella poesia di Guillaume Apollinaire: “Le pont Mirabeau”; non in politica.
Sartre, nel marzo 1980, a tre settimane della sua morte, dichiarava: "Occorre provare a spiegare che il mondo d’oggi, che è orribile, è solamente un momento nel lungo sviluppo storico, che la speranza è sempre stata una delle forze dominanti delle rivoluzioni e delle insurrezioni, e che considero ancora la speranza come la mia concezione riguardo al futuro."
Bisogna comprendere che la violenza volta le spalle alla speranza. Bisogna preferirle la speranza, la speranza della non-violenza. È la strada che dobbiamo imparare a seguire. Sia da parte degli oppressori che degli oppressi, bisogna arrivare ad un negoziato per eliminare l’oppressione; è questo che permetterà di vincere la violenza terroristica. Perché non si deve lasciare accumulare troppo odio.
Il messaggio di un Mandela, di un Martin Luther King, trova tutta la sua pertinenza in un mondo che ha superato lo scontro ideologico ed il totalitarismo di conquista. È un messaggio di speranza nella capacità delle società moderne di superare i conflitti tramite la comprensione reciproca ed una pazienza vigile. Per giungere a ciò, bisogna basarsi sui diritti la cui violazione, chiunque ne sia responsabile, deve provocare la nostra indignazione. Non si deve transigere su questi diritti.
Per un’insurrezione pacifica
Ho notato - e non sono il solo - la reazione del governo israeliano di fronte al fatto che ogni venerdì i cittadini di Bil'id vanno, senza gettare pietre, senza utilizzare la forza, fino al muro contro il quale protestano. Le autorità israeliane hanno qualificato questa marcia come “terrorismo non violento”. Mica male... Occorre essere israeliano per definire terrorismo la non-violenza. Bisogna essere soprattutto imbarazzati dall'efficacia della nonviolenza che suscita l’appoggio, la comprensione, il sostegno di quanti nel mondo sono contro l'oppressione.
Il pensiero produttivista, diffuso in occidente, ha trascinato il mondo in una crisi da cui occorre uscire abbandonando velocemente la concezione del "sempre di più", nel campo finanziario ma anche nel campo delle scienze e delle tecniche. È ormai tempo che i valori etici, di giustizia, di sviluppo sostenibile diventino prevalenti. Perché rischi gravissimi ci minacciano e possono mettere un termine all'avventura umana su un pianeta che diventa inospitale.
Ma è indiscutibile che importanti progressi siano stati fatti dal 1948 in poi: la decolonizzazione, la fine dell'apartheid, la distruzione dell’impero sovietico, la caduta del Muro di Berlino. Invece, i primi dieci anni del XXI secolo sono stati una fase di arretramento. Questa involuzione io la spiego in parte con la presidenza americana di George Bush, l’11 settembre, e le conseguenze disastrose che ne hanno tratto gli Stati Uniti, come l’intervento militare in Iraq.
Abbiamo avuto questa grave crisi economica, ma non abbiamo di contro avviato una nuova politica di sviluppo. Parimenti, l’incontro al vertice di Copenaghen contro il riscaldamento climatico non ha permesso di iniziare una vera politica per la salvaguardia del pianeta. Siamo sul limitare, tra gli orrori del primo decennio e le opportunità dei prossimi.
Ma bisogna sperare, occorre sempre sperare. Il decennio precedente, quello degli anni ‘90, era stato motore di grande progresso. Le Nazioni unite hanno saputo convocare delle conferenze come quella di Rio sull’ambiente, nel 1992; quella di Pechino sulle donne, nel 1995; nel settembre 2000, su iniziativa del segretario generale delle Nazioni unite, Kofi Annan, i 191 paesi membri hanno adottato la dichiarazione sugli “Otto obiettivi del millennio per lo sviluppo”, con cui si impegnano a dimezzare la povertà nel mondo entro il 2015. È mio grande dispiacere che né Obama né I'Unione europea si siano ancora espressi riguardo al loro apporto per una fase costruttiva, appoggiandosi sui valori fondamentali.
Come concludere questo appello ad indignarsi? Ricordando ancora ciò che l’8 marzo 2004, in occasione del sessantesimo anniversario del Programma del Consiglio nazionale della Resistenza, noi veterani dei movimenti di Resistenza e delle forze combattenti della Francia libera (1940-1944) dicevamo, che certo “il nazismo è stato sconfitto, grazie al sacrificio dei nostri fratelli e sorelle della Resistenza e delle Nazioni unite contro la barbarie fascista. Ma questa minaccia non è sparita totalmente e la nostra irritazione contro l'ingiustizia è ancora intatta”.
No, questa minaccia non è sparita totalmente. Perciò, chiamiamoci sempre ad “una vera insurrezione pacifica contro i mezzi di comunicazione di massa che non propongono come orizzonte per la nostra gioventù altro che il consumo di massa, il disprezzo dei più deboli e della cultura, l’amnesia generalizzata e la competizione a oltranza di tutti contro tutti”.
A coloro che vivranno il 21° secolo, diciamo con il nostro affetto: CREARE È RESISTERE. RESISTERE È CREARE.
Stéphane Hessel
A partire dal 1945, dopo un dramma atroce, è ad una ambiziosa risurrezione che si dedicano le forze presenti in seno al Consiglio della Resistenza. Ricordiamolo, allora fu creata la Sicurezza sociale come la Resistenza l'aveva prefigurata, come il suo programma la definiva: ”Un piano completo di Sicurezza sociale, mirante ad assicurare a tutti i cittadini i mezzi di sussistenza, in tutti i casi in cui sono incapaci di procurarseli con il lavoro”; “Una pensione che permetta ai vecchi lavoratori di finire dignitosamente i loro giorni”. Le fonti energetiche, l'elettricità e il gas, le miniere di carbone, le grandi, banche sono nazionalizzate. È ciò che questo programma raccomandava ancora... "il ritorno alIa nazione dei grande mezzi di produzione monopolizzata, frutto del lavoro comune, delle sorgenti di energia, delle ricchezze del sottosuolo, delle compagnie di assicurazione e delle grandi banche; “L'instaurazione di una vera democrazia economica e sociale, implica l'esclusione dei grandi feudi economici e finanziari nella direzione dell'economia".
L’interesse generale deve prevalere sulI'interesse particolare, l’equa distribuzione delle ricchezze create dal mondo del lavoro prevalere sul potere del denaro. La Resistenza propose “un'organizzazione razionale dell'economia che assicuri la subordinazione degli interessi particolari all’interesse generale, affrancata dalla dittatura professionale instaurata sull’esempio degli Stati fascisti”; ed il Governo provvisorio della Repubblica se n’è fatto portavoce.
Una vera democrazia ha bisogno di una stampa indipendente; la Resistenza lo sa, lo esige, difendendo "la libertà della stampa, il suo onore e la sua indipendenza rispetto allo Stato, al potere del denaro e alle influenze straniere”. Questo è ciò che riferiscono ancora le ordinanze sulla stampa, fin da 1944. Ora è proprio questo che oggi è in pericolo.
La Resistenza ci chiamava alla “possibilità effettiva per tutti i bambini francesi di beneficiare dell'istruzione più avanzata”, senza discriminazione; ora, le riforme proposte nel 2008 vanno contro questo progetto. Dei giovani insegnanti di cui sostengo l'azione, si sono rifiutati di applicarle ed hanno visto i loro stipendi mutilati a guisa di punizione. Si sono indignati, hanno “disubbidito", hanno giudicato queste riforme troppo lontane dall'ideale della scuola repubblicana, troppo al servizio di una società del denaro e non più in grado di sviluppare lo spirito creativo e critico.
È tutto lo zoccolo delle conquiste sociali della Resistenza che è rimesso oggi in discussione. Movente della resistenza è l'indignazione. C'è chi ha il coraggio di sostenere che lo stato non può assicurare più i costi di queste misure civili e sociali. Ma come può mancare oggi il denaro per mantenere e prolungare queste conquiste dal momento che la produzione di ricchezze è aumentata considerevolmente dalla Liberazione, periodo in cui l'Europa era in rovina? Se non perché il potere del denaro, così combattuto dalla Resistenza, non è stato mai tanto grande, insolente, egoista, coi suoi propri servitori fino alle più alte sfere dello stato. Le banche oramai privatizzate si mostrano in primo luogo preoccupate dei loro dividendi, e dei cospicui stipendi dei loro dirigenti, non dell'interesse generale. La distanza tra i più poveri e i più ricchi non è stata mai tanto rilevante; e la corsa al denaro, la competizione, tanto incoraggiata.
Il motivo di base della Resistenza era l'indignazione
Noi, veterani dei movimenti di resistenza e delle forze combattenti della Francia libera, chiamiamo le giovani generazioni a far rivivere, trasmettere, l'eredità della Resistenza ed i suoi ideali. Diciamo loro: prendete il testimone, indignatevi! I responsabili politici, economici, intellettuali e l'insieme della società non devono disorientarsi, né lasciarsi impressionare dall'attuale dittatura internazionale dei mercati finanziari che minaccia la pace e la democrazia.
Auguro a tutti voi, a ciascuno di voi, di avere il vostro motivo di indignazione. È una cosa preziosa. Quando qualche cosa vi indigna come sono stato indignato io per il nazismo, allora si diventa militante, forte ed impegnato. Si raggiunge la corrente della storia e la grande corrente della storia deve proseguire grazie a ciascuno. E questa corrente va nel senso di una maggiore giustizia, di più libertà ma non questa libertà incontrollata della volpe nel pollaio.
Questi diritti di cui la Dichiarazione universale ha redatto il programma nel 1948, sono universali. Se incontrate qualcuno che non ne beneficia, compiangetelo, aiutatelo a conquistarli.
Due visioni della storia
Quando provo a comprendere ciò che ha causato il fascismo che ha fatto sì che fossimo invasi e conoscessimo Vichy, mi dico che i possidenti, col loro egoismo, hanno avuto terribilmente paura della rivoluzione bolscevica. Essi si sono lasciati guidare dalle loro paure. Ma se, oggi come allora, una minoranza attiva si solleva, ciò basterà, avremo il lievito affinché la pasta gonfi.
Certo, l'esperienza di uno molto anziano come me, nato nel 1917, si differenzia dall’esperienza dei giovani di oggi. Chiedo spesso ai professori dei licei di poter dialogare con i loro alunni, e dico loro: voi non avete le stesse ragioni evidenti di impegnarvi. Per noi, resistere, era non accettare l'occupazione tedesca, la disfatta. Era relativamente semplice. Semplice come ciò che ne è seguito, la decolonizzazione. Poi la guerra d'Algeria. Occorreva che l'Algeria diventasse indipendente, era evidente. In quanto a Stalin, abbiamo applaudito tutti alla vittoria dell'armata rossa contro i nazisti, nel 1943. Ma già da quando avevamo avuto conoscenza dei grande processi stalinisti del 1935, ed anche se bisognava mantenere un orecchio aperto verso il comunismo per controbilanciare il capitalismo americano, la necessità di opporsi a questa forma insopportabile di totalitarismo si era imposta come un'evidenza.
La mia lunga vita mi ha dato una sequela di ragioni per indignarmi. Queste ragioni sono state prodotte più da una volontà di impegno che da un'emozione. Il giovane normale che ero, era stato molto segnato da Sartre, un compagno maggiore. La Nausea, Il Muro, non L’essere e il nulla, sono stati molto importanti nella formazione del mio pensiero. Sartre ci ricordato: "Voi siete responsabili in quanto individui". Era un messaggio libertario. La responsabilità dell’uomo che non può affidarsi né ad un potere né ad un dio. Al contrario, bisogna impegnarsi in nome della propria responsabilità di persona umana.
Quando mi sono iscritto alla scuola normale di via d’Ulm, a Parigi, nel 1939, io ci entravo come fervente discepolo del filosofo Hegel, e seguivo il seminario di Maurice Merleau-Ponty. Il suo insegnamento esplorava l’esperienza concreta, quella del corpo e delle sue relazioni col senso, grande singolare faccia al plurale dei sensi. Ma il mio ottimismo naturale, che vuole che tutto ciò che è augurabile sia possibile, mi portava piuttosto verso Hegel.
La filosofia hegeliana interpreta la lunga storia dell’umanità come avente un senso: è la libertà dell’uomo che progredisce tappa dopo tappa. La storia è fatta di shock successivi, è la messa in conto di sfide. La storia delle società progredisce, e infine, quando l’uomo ha raggiunto la sua piena espressione, abbiamo lo stato democratico nella sua forma ideale.
Esiste certamente un’altra concezione della storia. I progressi ottenuti nella libertà, la competizione, la corsa, al "sempre di più", tutto questo può essere vissuto come un uragano distruttivo. Così lo rappresenta un amico di mio padre, l’uomo che ha diviso con lui il compito di tradurre in tedesco À la Recherche du temps perdu di Marcel Proust.
È il filosofo tedesco Walter Benjamin. Egli aveva tratto un messaggio pessimista da un quadro del pittore svizzero Paul Klee, l'Angelus Novus, dove la figura dell’angelo apre le braccia come per contenere e respingere una tempesta che identifica col progresso. Per Benjamin che si suiciderà nel settembre 1940 per sfuggire al nazismo, il senso della storia è l'avanzamento irresistibile di catastrofe in catastrofe.
L’indifferenza: il peggiore degli atteggiamenti
È vero, le ragioni di indignarsi possono sembrare oggi meno nette o il mondo troppo complesso. Chi comanda, chi decide? Non è sempre facile distinguere tra tutte le forze che ci governano. Non si tratta più di una piccola elite di cui comprendiamo chiaramente l’operato. È un vasto mondo che sappiamo bene essere interdipendente.
Viviamo in una interconnettività come non era mai esistita. Ma in questo mondo ci sono delle cose insopportabili. Per vederle, bisogna ben guardare, cercare.
Dico ai giovani: cercate un poco, andate a trovare. Il peggiore degli atteggiamenti è l’indifferenza, dire “io non posso niente, me ne infischio". Comportandovi così, perdete una delle componenti essenziali che ci fa essere uomini. Una delle componenti indispensabili: la facoltà di indignazione e l’impegno che ne è la diretta conseguenza.
Si possono identificare già due grandi nuove sfide:
1. L’immenso scarto che esiste tra i molto poveri ed i troppo ricchi e che non cessa di aumentare. Questo è un prodotto del XX e del XXI secolo. I molto poveri nel mondo d’oggi guadagnano appena due dollari al giorno. Non si può lasciare che questa forbice si allarghi ancora. Questa constatazione sola deve suscitare un impegno.
2. I diritti dell’uomo e lo stato del pianeta. Ho avuto la fortuna dopo la Liberazione di essere associato alla redazione della Dichiarazione universale dei diritti dell’uomo adottata dall’Organizzazione delle Nazioni unite, il 10 dicembre 1948, a Parigi, al palazzo di Chaillot. Nella funzione di capo di gabinetto di Henri Laugier, segretario generale aggiunto dell’ONU, e di segretario della Commissione dei Diritti dell’uomo sono stato ammsso, con altri, a partecipare alla redazione di questa dichiarazione.
Non potrei dimenticare, nella sua elaborazione, il ruolo di René Cassin, commissario nazionale alla Giustizia e all'educazione del governo della Francia libera, a Londra, nel 1941, premio Nobel della pace nel 1968; né quello di Pierre Mendès France in seno al Consiglio economico e sociale cui i testi che elaboravamo erano sottoposti, prima di essere esaminati dalla Terza commissione dell'assemblea generale, responsabile delle questioni sociali, umanitarie e culturali. Essa contava i cinquantaquattro Stati membri, all'epoca, delle Nazioni unite, ed io ne assicuravo la segreteria. È a René Cassin che dobbiamo il termine di diritti “universali” e non “internazionali” come proponevano i nostri amici anglosassoni. Perché è proprio lì la scommessa a uscire dalla seconda guerra mondiale: emanciparsi dalle minacce che il totalitarismo ha fatto pesare sull’umanità.
Per emanciparsi, bisogna ottenere che gli Stati membri dell’ONU si impegnino a rispettare questi diritti universali. È un modo di sventare l'argomento della piena sovranità che uno Stato può far valere mentre si dedica ai crimini contro l'umanità sul suo suolo. Questo fu il caso di Hitler che si stimava padrone di se stesso ed autorizzato a provocare un genocidio.
Questa dichiarazione universale deve molto alla repulsione universale contro il nazismo, il fascismo, il totalitarismo, e inoltre, per la nostra presenza, allo spirito della Resistenza. Sentivo che bisognava fare rapidamente, non lasciarsi ingannare dall’ipocrisia che c'era nell'adesione proclamata dai vincitori a questi valori che non tutti avevano l'intenzione di promuovere in modo leale, ma che noi tentavamo di imporre loro.
Non resisto alla voglia di citare l’articolo 15 della Dichiarazione universale dei Diritti dell’uomo: "ogni individuo ha diritto ad una nazionalità"; l’articolo 22: “Ciascuno, in quanto membro della società, ha diritto alla Sicurezza sociale; essa è finalizzata ad ottenere la soddisfazione dei diritti economici, sociali e culturali indispensabili alla sua dignità ed al libero sviluppo della sua personalità, grazie allo sforzo nazionale ed alla cooperazione internazionale, tenuto conto dell’organizzazione e delle risorse di ciascun paese”. E se questa dichiarazione ha una portata dichiarativa, e non giuridica, non ha giocato un ruolo meno importante dopo il 1948; si sono visti popoli colonizzati impadronirsene nella loro lotta di indipendenza; ha inseminato gli spiriti nella lotta per la libertà.
Constato con piacere che nel corso degli ultimi decenni si sono moltiplicate le organizzazioni non governative, i movimenti sociali come Attac (Associazione per la tassazione delle transazioni finanziarie), il FIDH (Federazione internazionale dei Diritti dell’uomo), Amnesty... che sono attive e ad alto rendimento. È evidente che per essere efficaci oggi, bisogna agire in rete, approfittare di tutti i mezzi moderni di comunicazione.
Ai giovani, dico: guardate intorno a voi, troverete i temi che giustificano la vostra indignazione – il trattamento riservato agli immigrati, agli illegali, ai Roms. Troverete delle situazioni concrete che vi porteranno a dare corso ad un'azione forte di impegno civile e sociale. Cercate e troverete!
La mia indignazione a proposito della Palestina
Oggi, la mia principale indignazione riguarda la Palestina, la striscia di Gaza, la Cisgiordania. Questo conflitto è causa per me di grande indignazione. Occorre assolutamente leggere il rapporto Goldstone del settembrc 2009 su Gaza, nel quale questo giudice sud-africano, ebreo che si dice anche sionista, accusa l'esercito israeliano di avere commesso, durante l’operazione "Piombo fuso" durata tre settimane, “atti assimilabili a crimini di guerra e forse, in certe circostanze, a crimini contro l’umanità”.
Io stesso sono tornato a Gaza, nel 2009, dove sono potuto entrare con la mia donna grazie ai nostri passaporti diplomatici, per valutare de visu ciò che questo rapporto sosteneva. Le persone che ci accompagnavano non sono state autorizzate ad addentrarsi nella striscia di Gaza e in Cisgiordania.
Abbiamo visitato anche i campi di profughi palestinesi assegnati fin da 1948 dall’Agenzia delle Nazioni unite, l’UNRWA, dove più di tre milioni di Palestinesi, cacciati dalle loro terre da parte d'Israele, aspettano un rientro sempre più problematico. In quanto a Gaza, è una prigione a cielo aperto per un milione e mezzo di Palestinesi. Una prigione dove si organizzano per sopravvivere.
Più delle distruzioni materiali come quella dell'ospedale della Mezzaluna rossa da parte di "Piombo fuso", è il comportamento degli abitanti di Gaza, il loro patriottismo, il loro amore del mare e delle spiagge, la loro costante preoccupazione del benessere dei loro bambini, innumerevoli e ridenti, che persiste nella nostra memoria.
Siamo stati impressionati dal loro ingegnoso modo di fare fronte a tutte le penurie che devono sopportare. Li abbiamo visti preparare dei mattoni senza cemento per ricostruire le migliaia di case distrutte dai carri. C'è stato confermato che durante l’operazione “Piombo fuso" condotta dall’esercito israeliano, ci sono stati millequattrocento morti - donne, bambini, vecchi confinati nel campo palestinese - contro solamente cinquanta feriti israeliani. Condivido le conclusioni del giudice sud-africano. Che gli Ebrei possano perpetrare, proprio loro, dei crimini di guerra, è insopportabile. Ahimè, la storia offre pochi esempi di popoli che traggano insegnamento dalla propria storia.
Lo so, Hamas che ha vinto le ultime elezioni legislative non ha saputo evitare che fossero lanciati razzi sulle città israeliane in risposta alla situazione di isolamento e di blocco nella quale si trovano gli abitanti di Gaza. Penso evidentemente che il terrorismo sia inaccettabile, ma bisogna riconoscere che quando si è occupati con mezzi militari infinitamente superiori a quelli di cui si dispone, la reazione popolare non può che essere violenta.
Torna utile ad Hamas lanciare razzi sulla città di Sdérot? La risposta è no. Ciò non favorisce la sua causa, ma questo gesto si può spiegare con l’esasperazione degli abitanti di Gaza. Nella nozione di esasperazione, bisogna comprendere la violenza come una spiacevole conclusione di situazioni inaccettabili per coloro che le subiscono. Allora, si può dire che il terrorismo è una forma di esasperazione. E che questa esasperazione è un termine negativo. Non si dovrebbe esasperare, occorrerebbe sperare. L’esasperazione nasce da una negazione di speranza. Comprensibile, direi quasi naturale, ma ugualmente inaccettabile. Perché non permette di ottenere i risultati che può eventualmente produrre la speranza.
La non-violenza, la strada che dobbiamo imparare a seguire
Sono convinto che il futuro appartiene alla nonviolenza, alla conciliazione tra le culture differenti. È per questa via che l'umanità dovrà superare il suo prossimo traguardo. In ciò sono d’accordo con Sartre, non possiamo giustificare i terroristi che gettano bombe, li possiamo solo comprendere.
Sartre nel 194l scrive: “Riconosco che la violenza sotto qualunque forma si manifesti è un insuccesso. Ma è un insuccesso inevitabile perché viviamo in un universo di violenza. E se è vero che col ricorso alla violenza resta la violenza che rischia di perpetuarsi, è anche vero che è l'unico modo per farla cessare”.
Al che aggiungerei che la non-violenza è un mezzo più sicuro per farla cessare. Non si possono sostenere i terroristi in nome di questo principio, come ha fatto Sartre durante la guerra d'Algeria o all'epoca dell'attentato contro gli atleti israeliani durante i giochi di Monaco del 1972. Non è efficace e Sartre finirà per interrogarsi alla fine della sua vita sul senso del terrorismo e a dubitare della sua ragion d'essere.
Dire “la violenza non è efficace", è più importante che sapere se dobbiamo condannare o no coloro che si dedicano ad essa. Il terrorismo non è efficace. Nella nozione di efficacia, occorre una speranza non violenta. Una speranza violenta si trova nella poesia di Guillaume Apollinaire: “Le pont Mirabeau”; non in politica.
Sartre, nel marzo 1980, a tre settimane della sua morte, dichiarava: "Occorre provare a spiegare che il mondo d’oggi, che è orribile, è solamente un momento nel lungo sviluppo storico, che la speranza è sempre stata una delle forze dominanti delle rivoluzioni e delle insurrezioni, e che considero ancora la speranza come la mia concezione riguardo al futuro."
Bisogna comprendere che la violenza volta le spalle alla speranza. Bisogna preferirle la speranza, la speranza della non-violenza. È la strada che dobbiamo imparare a seguire. Sia da parte degli oppressori che degli oppressi, bisogna arrivare ad un negoziato per eliminare l’oppressione; è questo che permetterà di vincere la violenza terroristica. Perché non si deve lasciare accumulare troppo odio.
Il messaggio di un Mandela, di un Martin Luther King, trova tutta la sua pertinenza in un mondo che ha superato lo scontro ideologico ed il totalitarismo di conquista. È un messaggio di speranza nella capacità delle società moderne di superare i conflitti tramite la comprensione reciproca ed una pazienza vigile. Per giungere a ciò, bisogna basarsi sui diritti la cui violazione, chiunque ne sia responsabile, deve provocare la nostra indignazione. Non si deve transigere su questi diritti.
Per un’insurrezione pacifica
Ho notato - e non sono il solo - la reazione del governo israeliano di fronte al fatto che ogni venerdì i cittadini di Bil'id vanno, senza gettare pietre, senza utilizzare la forza, fino al muro contro il quale protestano. Le autorità israeliane hanno qualificato questa marcia come “terrorismo non violento”. Mica male... Occorre essere israeliano per definire terrorismo la non-violenza. Bisogna essere soprattutto imbarazzati dall'efficacia della nonviolenza che suscita l’appoggio, la comprensione, il sostegno di quanti nel mondo sono contro l'oppressione.
Il pensiero produttivista, diffuso in occidente, ha trascinato il mondo in una crisi da cui occorre uscire abbandonando velocemente la concezione del "sempre di più", nel campo finanziario ma anche nel campo delle scienze e delle tecniche. È ormai tempo che i valori etici, di giustizia, di sviluppo sostenibile diventino prevalenti. Perché rischi gravissimi ci minacciano e possono mettere un termine all'avventura umana su un pianeta che diventa inospitale.
Ma è indiscutibile che importanti progressi siano stati fatti dal 1948 in poi: la decolonizzazione, la fine dell'apartheid, la distruzione dell’impero sovietico, la caduta del Muro di Berlino. Invece, i primi dieci anni del XXI secolo sono stati una fase di arretramento. Questa involuzione io la spiego in parte con la presidenza americana di George Bush, l’11 settembre, e le conseguenze disastrose che ne hanno tratto gli Stati Uniti, come l’intervento militare in Iraq.
Abbiamo avuto questa grave crisi economica, ma non abbiamo di contro avviato una nuova politica di sviluppo. Parimenti, l’incontro al vertice di Copenaghen contro il riscaldamento climatico non ha permesso di iniziare una vera politica per la salvaguardia del pianeta. Siamo sul limitare, tra gli orrori del primo decennio e le opportunità dei prossimi.
Ma bisogna sperare, occorre sempre sperare. Il decennio precedente, quello degli anni ‘90, era stato motore di grande progresso. Le Nazioni unite hanno saputo convocare delle conferenze come quella di Rio sull’ambiente, nel 1992; quella di Pechino sulle donne, nel 1995; nel settembre 2000, su iniziativa del segretario generale delle Nazioni unite, Kofi Annan, i 191 paesi membri hanno adottato la dichiarazione sugli “Otto obiettivi del millennio per lo sviluppo”, con cui si impegnano a dimezzare la povertà nel mondo entro il 2015. È mio grande dispiacere che né Obama né I'Unione europea si siano ancora espressi riguardo al loro apporto per una fase costruttiva, appoggiandosi sui valori fondamentali.
Come concludere questo appello ad indignarsi? Ricordando ancora ciò che l’8 marzo 2004, in occasione del sessantesimo anniversario del Programma del Consiglio nazionale della Resistenza, noi veterani dei movimenti di Resistenza e delle forze combattenti della Francia libera (1940-1944) dicevamo, che certo “il nazismo è stato sconfitto, grazie al sacrificio dei nostri fratelli e sorelle della Resistenza e delle Nazioni unite contro la barbarie fascista. Ma questa minaccia non è sparita totalmente e la nostra irritazione contro l'ingiustizia è ancora intatta”.
No, questa minaccia non è sparita totalmente. Perciò, chiamiamoci sempre ad “una vera insurrezione pacifica contro i mezzi di comunicazione di massa che non propongono come orizzonte per la nostra gioventù altro che il consumo di massa, il disprezzo dei più deboli e della cultura, l’amnesia generalizzata e la competizione a oltranza di tutti contro tutti”.
A coloro che vivranno il 21° secolo, diciamo con il nostro affetto: CREARE È RESISTERE. RESISTERE È CREARE.
Stéphane Hessel
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